Laurent a écrit
Bah, l’anglais est encore bien pire à ce niveau.
En français, on peut dans une bonne mesure déduire la prononciation de l’écrit (même si ça marche moins bien pour les finales quelquefois muettes ou pas). En anglais, c’est complètement fichu.
Le français et l’anglais sont pareils de ce point de vue. C’est uniquement l’habitude qui nous fait voir des règles (au mieux très compliquées) qui n’existent pas toujours.
Dans les langues phonétiques ou quasi-phonétiques (finnois, espéranto, espagnol ou italien) il suffit de connaitre la prononciation de chaque lettre pour pouvoir prononcer un mot, même totalement inconnu.
En français quelle est la prononciation de la lettre C ? En général on répond « /s/ devant e, i et y; et /k/ ailleurs ». Et si il est suivit d’un H ? alors là il se prononce /ʃ/. On croit avoir une règle (pas si simple) et on se rend compte que « charisme » se prononce /ka.ʁism/ ! Pourquoi ? parce que c’est un mot d’origine grecque. C’est la seule et unique raison. Donc pour savoir prononcer ce mot, il faut déjà connaitre son origine.
D’ailleurs dans un dictionnaire français ou anglais, la prononciation est presque toujours indiquée (alors que ce n’est pas le cas pour les langues phonétiques) justement parce qu’il est très compliqué voir impossible de déterminer la prononciation par un jeu de règle.
Laurent a écrit
LeBret a écritPar exemple si on prend un nom commun et qu’on le mets au pluriel, à l’écrit il y a presque toujours une différence ; alors qu’à l’oral il n’y en a presque jamais.
Il paraît que le S du pluriel se prononçait à une époque.
Oui, ainsi que que le Z de la 2ème personne du pluriel. Mais à partir du moment où ces lettres ne sont plus prononcées à quoi bon les garder à l’écrit ?
Laurent a écrit
Mimoza a écritBizarrement l'espagnol n'a pas dévié de cette manière.
L’espagnol n’a pas la même histoire, c’est « simplement » une langue romane.
Le français est une langue romane qui a été croisée avec une langue germanique lors de l’invasion des francs.
Et pareil pour l’anglais, langue aussi de la famille germanique qui a été croisée avec
le normand (patois français) puis le français suite à l’invasion par les normands.
Pour ma part j’affirme haut et fort que le français n’est qu’un patois normand 😃 Le normand est langue officielle (de la cour d’Angleterre) dès le 11ème siècle, alors que le français n’a ce statut que depuis 1539.
Plus sérieusement le latin n’a que 5 voyelles avec autant de lettres pour les représenter. Les langues romanes « pures » n’en ont guère plus (env. 7). Les langues comme le français ou l’anglais en ont entre 12 et 16 à l’oral (à cause de leur origine germanique) avec toujours les mêmes 5 lettres à l’écrit. D’où les problèmes.
Voyelles et consonnes confondues, l’anglais et le français ont environ 45 sons pour seulement 26 signes écrits. Ça ne peut pas bien se passer. L’idée du français d’introduire des accents était plutôt bonnes, mais elle a été mal exploité. Déjà l’accent ne représente pas toujours une différence (ou ne représente plus cette différence). Mais en plus certains accents tout à fait pertinent ont été supprimés. Par exemple jusqu’au 17ème siècle, les voyelles nasales (an, en, un… ) étaient représentées par une tilde. Ainsi le « temps » s’écrivait simplement « tã » c’est tout de même plus simple !
Laurent a écrit
L’autre explication de la complexité inutile de l’écriture du français, c’est que nos érudits (rappel : à une époque, le petit peuple ne savait même pas lire ou écrire) ont décidé que l’écriture devait refléter l’étymologie et pas bêtement indiquer la prononciation. Il faut croire que ceux qui ont décidé de l’écriture de l’espagnol étaient moins prétentieux…
Oui. C’est ce qu’on a appelé la relatinisation du français. Entre la 2ème et la 3ème édition du dictionnaire de l’académie française, 40% du vocabulaire a changé d’orthographe alors que ces 2 éditions n’ont que 40 ans d’écart. Je pense que pour une part cette volonté était due à un complexe d’infériorité des français (dont la langue était « bâtarde »).
Il y avait aussi sans doute une volonté d’unifier. À l’époque de la révolution, moins de 11% de la population parlait français (les autres parlaient breton, occitan… ou normand 😛 et en 1900 ils étaient 50%). Quand à faire le choix d’une orthographe étymologique, c’est aussi pour en faire un outils de discrimination sociale. C’est écrit en toutes lettres dans la préface de la 3ème édition du dictionnaire de l’académie : « pouvoir distinguer les gens nés [= les nobles] du vulgaire et des femmes » Car les nobles apprenaient forcément le latin en même temps que le français. Quand on sait qu’en latin le temps se dit /tempus/ et s’écrit tempus, il est très facile de se rappeler que /tã/ s’écrit temps. Pour les autres c’est la galère.
Cette volonté de discrimination entre nobles et bourgeois se voit dans « le bourgeois gentilhomme » de Molière (discrimination qu’il approuve, la pièce étant présentée aux nobles !)